Aller directement au contenu.

Suivi de l'occupation du sol le long du Saint-Laurent en 2015

Version PDF

État de l'indicateur : intermédiaire

Nom de l’indicateur : Suivi de l’occupation du sol
État : Intermédiaire en 2015
Tendance : Inchangé depuis 40 années

Faits saillants

L’occupation du sol des sous-bassins versants du fleuve Saint-Laurent dénote une augmentation des activités agricoles intensives et de l’étalement urbain. Cependant, en raison de la forte présence de la forêt dans les sous-bassins de la rive nord, le constat général de l’état de santé est jugé intermédiaire.
 

Figure 1. Schéma conceptuel montrant les trois indices d’état de santé retenus pour l’occupation du sol

Description longue

La figure 1 présente une bande de couleurs qui montre le diagnostic à l’égard de l’état de santé de l’occupation du sol. Une flèche indique un état global intermédiaire. Un schéma illustre des infrastructures urbaines, routières et agricoles intensives sur une rive et à peine présente sur l’autre rive qui présente une bande riveraine végétalisée. Les trois indices, pressions anthropiques, protection des cours d’eau et interconnexion des milieux naturels, sont aussi indiqués.

Problématique

Il existe des relations complexes entre l’état des rives du fleuve Saint-Laurent, l’occupation de sa vallée et l’état du fleuve lui-même. La démarche méthodologique de cette fiche d’information se fonde sur les énoncés suivants :

  • Un bassin versant qui fournit une bonne qualité de l’eau subit peu de pressions anthropiques directes;
  • Des milieux naturels autour des plans d’eau constituent des zones tampons protégeant les écosystèmes;
  • Le bassin versant comprend une mosaïque de milieux naturels interconnectés.

Mesures clés

Indices et critères d’évaluation de l’occupation du sol
Les pressions anthropiques représentent le pourcentage du sous-bassin versant couvert par les    activités agricoles et urbaines (SOLEC, 2016).
Agriculture
  • Moins de 20 % : l’état est jugé non préoccupant
  • De 20 à 50 % : l’état est à surveiller
  • Plus de 50 % : l’état est jugé préoccupant

Développement urbain

  • Moins de 6 % : l’état est jugé non préoccupant
  • De 6 à 27 % : l’état est à surveiller
  • Plus de 27 % : l’état est jugé préoccupant
La protection des cours d’eau est définie par le pourcentage de milieux naturels (milieux humides, prairies, forêts) retrouvé à l’intérieur d’une bande riveraine de 100 m.
  • Les milieux naturels occupent plus de 75 % : l’état est jugé non préoccupant
  • Les milieux naturels occupent de 50 à 75 % : l’état est à surveiller
  • Les milieux naturels occupent moins de 50 % : l’état est jugé préoccupant
L’interconnexion des milieux naturels est estimée à partir de la densité routière, c’est-à-dire la somme de la longueur des routes sur la superficie totale du sous-bassin versant (km/km2).
  • Si la densité routière est inférieure à 0,9 km/km2 : l’état est jugé non préoccupant
  • Si la densité routière est de 0,9 à 1,6 km/km2 : l’état est à surveiller
  • Si la densité routière est supérieure à 1,6 km/km2 : l’état est jugé préoccupant
L’analyse des changements est un indice quantitatif, mais sans critère d’évaluation, et qui montre l’évolution du paysage des années 1975 à 2015 pour les types de changements suivant :
  • De l’agriculture vers l’urbain;
  • De la forêt vers l’urbain;
  • De la forêt vers l’agriculture;
  • De la forêt vers le sol nu.

Les classes eau libre, milieux humides, prairie, agriculture, forêt, sol nu et urbain ont été cartographiées pour les sept sous-bassins analysés, soient : Montréal, rivière Yamaska, rivière Saint-François, rivière Nicolet, la rive nord du lac Saint-Pierre, rivière Saint-Maurice et rivière Jacques-Cartier. Pour Montréal, seule la partie canadienne du sous-bassin a été considérée. Des images de télédétection acquises en septembre 2015 par le satellite Landsat-8 OLI ont été utilisées pour la cartographie d’occupation du sol de 2015. Des images Landsat-5 TM et Landsat-7 ETM circa 2000 ont été utilisées pour la cartographie 2000 et des images Landsat-2 MSS circa 1975 ont été utilisées pour la cartographie 1975.

1 - Gracieuseté du USGS : earthexplorer.usgs.gov

Figure 2. Constat de l’état de santé des sous-bassins versants analysés, en 2015

Description longue

La figure 2 illustre la couverture géographique de chacun des sous-bassins versants à l’étude en plus de la répartition des classes d’occupation du sol et du constat de l’état pour chaque sous-bassin.

État et tendances

Le constat général de l’état des trois indices par sous-bassin versant est bon pour le nord du lac Saint-Pierre et la rivière Saint-Maurice; intermédiaire pour les rivières Jacques-Cartier, Nicolet et Saint-François; intermédiaire-mauvais pour la rivière Yamaska; et mauvais pour la région de Montréal. Le constat global pour les sept sous-bassins versants est jugé intermédiaire (figure 2).

Les pressions anthropiques

Les deux sous-bassins de la rive nord (le nord du lac Saint-Pierre et la rivière Saint-Maurice) présentent un état non préoccupant (en vert) pour 2015 avec des valeurs combinées (agriculture + urbanisation) allant de 5,4 à 14,5 %, selon les critères d’évaluation de cet indice. Quant aux sous-bassins de la rive sud (Montréal ainsi que les rivières Yamaska, Saint-François, Nicolet) et de la rivière Jacques-Cartier, ils présentent un état à surveiller (en jaune) avec des valeurs combinées allant de 16,9 à 58,0 %.

Les sept sous-bassins présentent une tendance stable en comparant ces résultats avec ceux de l’année 2000, puisqu‘ils ne changent pas de classe d’état d’une période à l’autre (tableau 1). Les données de 1975 ont été utilisées à titre indicatif seulement. En effet, la végétation herbacée a été entièrement attribuée à la classe agricole contrairement aux deux autres années où une classe de prairies naturelles a pu être distinguée en raison de la qualité des images de télédétection, ce qui a engendré une surestimation de l’agriculture dans les résultats de 1975. En outre, cet indice ne tient compte que de la pression globale des sous-bassins, indépendamment de la localisation des sources de pression locale ou diffuse sur le territoire et de la distance qui les sépare du fleuve.

Tableau 1. Résultats des pressions anthropiques

Sous-bassin versant1975
 
2000

 
2015

 
 AgriUrbArgiUrbConstatAgriUrbConstat
Rivière Saint-Maurice5,71,71,61,4Non Préoccupant1,44,0Non Préoccupant
Nord du lac Saint-Pierre18,10,711,91,2Non Préoccupant11,82,7Non Préoccupant
Rivière Jacques-Cartier10,26,73,27,4À surveiller3,113,8À surveiller
Rivière Saint-François42,21,321,42,8À surveiller22,76,4À surveiller
Rivière Nicolet52,70,431,41,2À surveiller33,73,4À surveiller
Rivière Yamaska58,11,138,03,0À surveiller42,25,1À surveiller
Montréal55,214,429,918,0À surveiller32,224,5À surveiller

Agri = % de l’agriculture dans le sous-bassin.
Urb = % de l’urbanisation.
Constat = Constat combiné.
Note : L’année 1975 n’a pas été qualifiée en raison de la surestimation de la classe agricole. Les cotes sont à titre indicatif seulement.

La protection des cours d’eau

Les trois sous-bassins de la rive nord (le nord du lac Saint-Pierre et les rivières Saint-Maurice et Jacques-Cartier) présentent un état non préoccupant avec des valeurs allant de 79,7 à 90,3 % selon les critères d’évaluation de cet indice. Les sous-bassins de la rivière Saint-François et la rivière Nicolet présentent un état à surveiller avec des valeurs respectives de 64,8 et 56,4 %. Finalement, les sous-bassins de Montréal et la rivière Yamaska présentent un état préoccupant avec des valeurs de 40,9 et 47,2 %.

Cinq sous-bassins présentent une tendance stable en comparant ces résultats avec ceux de l’année 2000. Seuls les sous-bassins de la rivière Yamaska et de Montréal montrent une dégradation de la protection des cours d’eau en raison de l’expansion des activités agricoles au détriment des milieux naturels (tableau 2). De même pour cet indice, l’année 1975 a été mentionnée à titre indicatif seulement en raison de la surestimation de l’agriculture au détriment des prairies naturelles.

Tableau 2. Résultats de la zone de protection

Sous-bassin versantPourcentage des milieux naturels, 1975Pourcentage des milieux naturels, 2000Pourcentage des milieux naturels, 2015
Rivière Saint-Maurice87,992,790,3
Rivière Jacques-Cartier81,686,980,4
Nord du lac Saint-Pierre74,082,279,7
Rivière Saint-François52,571,064,8
Rivière Nicolet40,365,956,4
Rivière Yamaska39,357,247,2
Montréal24,751,840,9

Note : L’année 1975 n’a pas été qualifiée en raison de la surestimation de la classe agricole. Les cotes sont à titre indicatif seulement.

La figure 3a illustre un exemple de la forte densité du réseau hydrographique pouvant exister au sein d’un sous-bassin versant pour la rivière Yamaska. L’agrandissement, représenté par la figure 3b, montre la zone de protection de 100 m de rive et son contenu en classes d’occupation du sol pour certains petits cours d’eau de la rivière.

Figure 3. Exemple de la densité du réseau hydrographique du sous-bassin de la rivière Yamaska et des zones de protection de 100 m de rive

Exemple de la densité du réseau hydrographique du sous-bassin de la rivière Yamaska et des zones de protection de 100 m de rive

L’interconnexion des milieux naturels

La densité du réseau routier tient un rôle important dans la segmentation du milieu, elle est aussi en quelque sorte indépendante et complémentaire à la couverture urbaine. Alberti et al. (2007), de même que Tiner (2004), proposent l’utilisation de la densité du réseau routier comme mesure permettant d’évaluer la dégradation de la qualité de l’eau ainsi que celle des écosystèmes aquatiques et terrestres.

Les deux sous-bassins de la rive nord (le nord du lac Saint-Pierre et la rivière Saint-Maurice) présentent un état non préoccupant selon les critères d’évaluation de cet indice. Les sous-bassins de la rive sud (les rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet) présentent un état à surveiller. Enfin, les sous-bassins de Montréal et de la rivière Jacques-Cartier présentent un état préoccupant (tableau 3).

Tableau 3. Résultats de l’intensité des pressions pour 2015

Sous-bassin versantDensité du réseau routier (km/km2)
Rivière Saint-Maurice0,62
Nord du lac Saint-Pierre0,72
Rivière Nicolet1,00
Rivière Yamaska1,20
Rivière Saint-François1,33
Rivière Jacques-Cartier1,95
Montréal3,87

Il n’y a pas de tendance calculée en raison de la difficulté à obtenir les réseaux routiers des décennies antérieures. De plus, un changement d’état entre deux périodes requiert une modification significative de la densité du réseau routier sur un intervalle aussi court, ce qui n’est pas survenu entre 2000 et 2015.

De façon générale, on peut constater que la classe forestière a une influence positive sur la rive nord du fleuve Saint-Laurent. Par contre l’agriculture a une influence négative sur la rive sud et la densité du réseau routier a une influence négative sur les deux grandes municipalités, Montréal et Québec, ce qu’illustre la figure 4.

Figure 4. L’état et la tendance des trois indices d’occupation du sol

L’état et la tendance des trois indices d’occupation du sol

Changements entre 1975, 2000, 2015

L’analyse des changements entre deux périodes met en valeur l’expansion (gain) et la réduction (perte) des classes d’occupation du sol d’un territoire et permet ainsi d’apprécier l’évolution du paysage. Pour cette analyse, les deux grandes régions urbaines, soient Montréal et Québec, sont considérés.

Région de Montréal
L’analyse des changements des classes d’occupation du sol entre les années 1975 et 2000 pour la grande région de Montréal montre que l’expansion urbaine s’est produite au détriment de la forêt et de l’agriculture sur l’île de Montréal, ainsi que sur les couronnes nord et sud pour un gain total de 225 km2 (figure 5a). L’expansion urbaine se poursuit entre 2000 et 2015, mais les zones touchées se retrouvent plus loin du fleuve. Cette expansion est pratiquement terminée sur l’île de Montréal, et est en forte diminution sur l’île Jésus (Laval) et la rive sud du fleuve. Toutefois, le secteur de Vaudreuil connaît un développement urbain appréciable. Le gain global de l’urbain est de 240 km2 (figure 5b). Ce qui ne ressort pas de ces statistiques est la densification du tissu urbain sur l’île de Montréal, où certains espaces urbains, notamment les stationnements et les habitations unifamiliales, ont été remplacés par des tours d’habitation.

Figure 5. Analyse des changements d’occupation du sol entre les années 1975 à 2000 et 2000 à 2015 pour la région de Montréal

Analyse des changements d’occupation du sol entre les années 1975 à 2000 et 2000 à 2015 pour la région de Montréal

Région de Québec
L’analyse des changements des classes d’occupation du sol pour la grande région de Québec montre que l’expansion urbaine s’est produite au détriment de l’agriculture dans la vallée du Saint-Laurent, totalisant un gain de 33,7 km2, entre 1975 et 2000 (figure 6a), et de 18,6 km2, entre 2000 et 2015 (figure 6b). La perte de forêt causée par l’expansion urbaine, surtout sur le Bouclier canadien, est passée de 13,6 km2, entre 1975 et 2000, à 54,6 km2, entre 2000 et 2015. Elle suit un axe nord-sud semblable à celui de la région de Montréal et s’éloigne du fleuve Saint-Laurent.

Figure 6. Analyse des changements d’occupation du sol entre les années 1975 à 2000 et 2000 à 2015 pour la région de Québec

Analyse des changements d’occupation du sol entre les années 1975 à 2000 et 2000 à 2015 pour la région de Québec

Conclusion

Le constat d’état général intermédiaire de l’occupation du sol s’explique en grande partie par :

  • la forte présence de la forêt qui prédomine dans les sous-bassins versants de la rive nord et de la rive sud;
  • la présence d’une zone de protection le long des cours d’eau;
  • la faible densité du réseau routier, à l’exception des régions de Montréal et de Québec.

Cet exercice visait à évaluer la contribution de chacun des sous-bassins versants analysés sur la qualité de l’eau du fleuve Saint-Laurent et a permis d’identifier les sous-bassins versants les plus susceptibles de nuire à la qualité de l’eau. Sans surprise, les sous-bassins de Montréal et de la rivière Yamaska figurent parmi ceux qui contribuent le plus à la dégradation de la qualité de l’eau. Cette analyse ne tient toutefois pas compte de la façon dont sont distribuées spatialement les classes d’occupation du sol au sein du paysage des sous-bassins versants.

Pour en savoir plus

Alberti, Marina, Derek Booth, Kristina Hill, Bekkah Coburn, Christina Avolio, Stefan Coe and Daniele Spirandelli. (2007). The impact of urban patterns on aquatic ecosystems: An empirical analysis in Puget lowland sub-basins. Landscape and Urban Planning 80, pp. 345-361.

Environment Canada and the U.S. Environmental Protection Agency, 2014, State of the Great Lakes 2011. Cat No. En161-3/1-2011E-PDF. EPA 950-R-13-002. Disponible au https://archive.epa.gov/solec/web/pdf/sogl-2011-technical-report-en.pdfLien externe.

SOLEC, 2016. Great Lakes (SOLEC) Indicators Descriptions for Reporting in 2016. Par Ecosystem Indicators and Reporting Task Team of the GLWQA, Document en préparation, pp. 114-120.

Tiner, Ralph W. (2004), Remotely-sensed indicators for monitoring the general condition of « natural habitat » in watersheds: an application for Delaware’s Nanticoke River watershed, Ecological Indicators 4, pp. 227-243.

Rédaction

Guy Létourneau
Monitoring et surveillance de la qualité des eaux douces
Environnement et Changement climatique Canada

Plusieurs pictogrammes du document sont une gracieuseté du site Integration and Application Network, Université du Maryland Center for Environmental Science (ian.umces.edu/symbols/Lien externe).