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2. Élaboration (PHASE I)

L’élaboration d’un PSSE nécessite la réalisation des activités suivantes (adapté de Michaud, 2000) :

  1. Formuler les objectifs du PSSE.
  2. Développer des hypothèses d’effets ou d’impacts vérifiables qui permettront au PSSE d’atteindre ses objectifs.
  3. Élaborer le plan de caractérisation physique, chimique et biologique :
    • déterminer et décrire les paramètres d’évaluation et de mesure qui visent à confirmer ou à rejeter les hypothèses;
    • déterminer les critères auxquels ces paramètres doivent répondre pour pouvoir confirmer les hypothèses (précision, exactitude, limites de détection, reproductibilité);
    • définir les moyens utilisés pour garantir la qualité des données;
    • définir les critères de traitement et d’interprétation des données, tant dans le contexte de la confirmation des hypothèses que du point de vue de la réalisation des objectifs;
    • déterminer les méthodes statistiques utilisées pour traiter les données.
  4. Élaborer le plan de contingence.
    • advenant la confirmation d’hypothèses d’impacts non nulles, déterminer les mesures d’intervention qui devraient être mises en œuvre pour atténuer ou éliminer ces impacts;
    • identifier les responsables de la mise en œuvre des mesures d’intervention.

En règle générale, les renseignements de base (activités du projet et composantes du milieu) nécessaires à l’élaboration d’un PSSE peuvent être retrouvés dans les rapports et les documents touchant à l’évaluation environnementale du projet concerné.

2.1 Objectifs du PSSE (activité 1)

La première activité de l’élaboration du PSSE vise à décrire la problématique associée au projet à l’étude (section 2.1.1) et à formuler les objectifs du PSSE (section 2.1.2). La formulation des objectifs du PSSE permet de préciser les besoins de surveillance et de suivi. De façon générale, l’évaluation environnementale du projet fournit la majorité des informations pertinentes à la réalisation de l’ensemble de cette première activité.

2.1.1 Description de la problématique

La description de la problématique vise à détailler les activités susceptibles d’entraîner des impacts sur l’une ou l’autre des composantes de l’environnement. L’intégration des informations recueillies pour décrire la problématique permet de préciser la portée du PSSE.

La description de la problématique comprend la mise en contexte, l’identification des ressources disponibles et l’élaboration des échéanciers applicables.

Les éléments suivants doivent être considérés :

  • les activités de dragage et de gestion des sédiments devant faire l’objet du PSSE : envergure du projet de dragage (durée, volume, technologie utilisée, etc.);
  • les composantes environnementales susceptibles d’être affectées et préalablement identifiées lors de l’évaluation environnementale du projet (voir l’encadré A-2 de l’annexe A);
  • les lois et règlements applicables, de même que les engagements pris par le promoteur et enchâssés dans les documents d’autorisation;
  • les organismes, individus et parties intéressés à la problématique;
  • les échéanciers visés par le PSSE.

La majorité des renseignements requis peuvent être retrouvés dans les rapports d’évaluation environnementale du projet. Par ailleurs, l’examen des études antérieures relatives au site concerné ou se rapportant à des problématiques similaires est utile afin d’identifier des éléments pertinents à la description de la problématique.

2.1.2 Formulation des objectifs du PSSE

De façon générale, un PSSE doit viser spécifiquement un ou plusieurs des objectifs suivants :

Pour la surveillance :

  • assurer le respect des lois et des règlements en vigueur, ainsi que les conditions fixées dans les décrets, les permis, les certificats d’autorisation, les devis et les contrats de dragage;
  • vérifier la validité et l’efficacité des mesures prises pour atténuer ou compenser les impacts négatifs anticipés lors de l’exécution des travaux;
  • vérifier l’efficacité environnementale anticipée des technologies et des matériaux utilisés;
  • aider le promoteur à prendre rapidement les mesures appropriées pour atténuer ou compenser les impacts (par le biais du plan de contingence), si une mesure d’atténuation ou de compensation s’avère inefficace lors de l’exécution des travaux ou advenant des impacts imprévus ou sous-estimés dans l’évaluation environnementale.

Pour le suivi :

  • vérifier, sur une période déterminée excédant généralement celle d’exécution des travaux :
    1. l’exactitude des prévisions d’impacts du projet sur des éléments importants de l’écosystème, particulièrement celles qui présentaient un niveau élevé d’incertitude;
    2. la validité et l’efficacité des mesures d’atténuation ou de compensation des impacts négatifs anticipés;
  • permettre de réagir rapidement si une mesure d’atténuation ou de compensation s’avère inefficace ou advenant l’apparition d’impacts imprévus après les travaux;
  • améliorer la capacité de prévision des évaluations environnementales subséquentes;
  • observer les effets de la mise en place de nouvelles technologies;
  • éliminer les mesures qui s’avèrent inefficaces;
  • contribuer à l’amélioration des équipements, des mesures d’atténuation, des mesures de protection et des bonnes pratiques de gestion environnementale.

En gardant en mémoire ces éléments, la détermination des objectifs du PSSE propre à un projet devrait découler directement de ceux qui ont été préalablement établis lors de l’évaluation environnementale du projet. Les évaluations environnementales permettent d’identifier des préoccupations particulières devant être prises en considération à cette étape-ci. Par exemple, ces préoccupations peuvent être associées à la présence d’un type de contamination spécifique provoquant des craintes importantes dans la population, à la présence d’une espèce faunique à statut particulier ou encore à des considérations de santé humaine. Dans ce dernier cas, il peut s’agir de la présence d’une prise d’eau potable à proximité du site. De tels éléments sont généralement identifiés par les parties intéressées (ministères et agences fédéraux et provinciaux, groupes environnementaux, etc.) et les préoccupations qu’ils suscitent peuvent être motivées par des facteurs sociaux, politiques ou économiques.

L’encadré A-3 de l’annexe A donne des exemples de formulation d’objectifs.

2.2 Développement des hypothèses d’impacts vérifiables (activité 2)

La deuxième activité de l’élaboration d’un PSSE consiste à développer des hypothèses d’impacts vérifiables. Cette activité débute par l’analyse des diverses composantes du projet telles que les sources d’impacts, les agents stresseurs, les écosystèmes, les récepteurs et les réponses appréhendées (section 2.2.1). Cette analyse, qui a pour but d’identifier les mécanismes d’impact à contrôler, conduit à l’élaboration d’un modèle conceptuel de la situation à l’étude en établissant clairement des relations (directes et indirectes) de cause à effet (section 2.2.2). Le développement d’un modèle conceptuel permet de préciser la compréhension de la problématique en prenant en considération le niveau d’incertitude associé aux effets anticipés sur le milieu. De ce modèle, découlent les hypothèses d’impacts vérifiables (section 2.2.3).

Il est important de se rappeler que la conception des plans ou des programmes d’échantillonnage de tout PSSE doit être basée sur des hypothèses prévoyant les réponses probables des composantes de l’environnement aux modifications du milieu. L’énergie qui devra être consacrée à cette étape dépendra de l’exhaustivité et du degré de connaissances que procurera l’évaluation environnementale du projet.

2.2.1 Identification des composantes du système étudié

L’identification des composantes du système étudié requiert une connaissance précise des activités du projet de dragage et/ou de gestion des sédiments, et de leurs interactions avec l’ensemble des composantes environnementales. Elle se base sur la compilation et l’analyse des renseignements disponibles propres au site ou en relation avec la problématique à l’étude :

  • analyse préalable des renseignements : l’analyse des données propres au site se fonde sur les cartes et plans du site, sur les données de caractérisation, sur la matrice d’impact produite lors de l’évaluation environnementale et sur tout autre document pertinent. L’analyse des renseignements issus de projets similaires effectués antérieurement peut également s’avérer fort utile à cette étape de l’élaboration du PSSE.
  • examen critique des données recueillies : l’examen critique des données a pour but de révéler les manques et les biais possibles dans les données disponibles afin de définir les besoins en données supplémentaires et les moyens à mettre en œuvre pour obtenir ces données. Cet examen doit être fait en considérant les sources d’impacts, les agents stresseurs, les composantes de l’écosystème, les récepteurs et les réponses appréhendées (voir encadré A-4 de l’annexe A).

2.2.2 Élaboration du modèle conceptuel

Un modèle conceptuel est un outil qui permet de décrire les liens entre les variables physiques, chimiques et biologiques des écosystèmes, les ressources à risque et les changements escomptés attribuables à un projet donné ou à des causes naturelles. Résultant de l’examen critique des données réalisé à l’étape précédente, le modèle conceptuel se veut une schématisation des mécanismes de migration des agents stresseurs dans l’écosystème à la suite des changements (prévus) qui découlent de la réalisation du projet. Il doit également préciser les limites scientifiques entourant les mécanismes schématisés. La compréhension qui découle d’un modèle conceptuel bien élaboré permet de formuler des hypothèses d’impacts vérifiables qui pourront par la suite être testées.

Prenant appui particulièrement sur la matrice d’impact de l’évaluation environnementale du projet, le modèle conceptuel s’élabore par l’entremise d’une analyse des sources de stress et des éléments de l’écosystème. Cette analyse doit être réalisée selon un cadre spatial et temporel concordant avec les impacts à vérifier. L’encadré A-5 de l’annexe A donne un exemple de matrice d’évaluation des impacts de projet de dragage et de gestion des sédiments. De son côté, l’encadré A-6 présente des éléments d’analyse pour l’élaboration du modèle conceptuel.

Le modèle conceptuel décrit la façon dont les agents stresseurs peuvent affecter les récepteurs. Il peut être simple et représenté par un seul diagramme schématique. Il peut se présenter aussi sous la forme d’une matrice d’impact, d’un schéma ou d’un tableau synthèse. Pour les activités de dragage, le modèle conceptuel peut être élaboré en deux parties. Une première partie faisant état de la situation lors de l’activité de dragage et l’autre partie faisant état de la situation après l’activité de dragage. La figure 4 montre un exemple de modèle conceptuel simple présenté sous forme de diagramme schématique.

L’annexe C présente des exemples de modèles conceptuels présentés sous forme de tableaux. Le tableau C-1 constitue un exemple de modèle conceptuel applicable au site de dragage pendant les travaux. Dans cet exemple, les sédiments dragués remis en suspension ou perdus lors du dragage causent une perturbation physique du milieu et constituent l’un des agents stresseurs reliés à l’activité de dragage représentant la source. Ces sédiments en suspension sont transportés par différents mécanismes vers la ou les composantes abiotiques de l’écosystème qui sont touchées par la perturbation. Dans le cadre d’un dragage, les sédiments remis en suspension sont principalement dirigés dans la colonne d’eau; ce sont les conditions hydrodynamiques qui déterminent leur dispersion dans le milieu. Les récepteurs exposés à l’agent stresseur par le biais de la composante abiotique ciblée doivent être énumérés. Les réponses appréhendées doivent être aussi identifiées.

La distinction entre les mécanismes régissant l’agent stresseur (remise en suspension ou perte au niveau de la benne) et ceux régissant l’écosystème (conditions hydrodynamiques) permet de cibler les aspects qui sont inhérents à la source et ceux qui sont inhérents au milieu. Cette compréhension est nécessaire pour l’élaboration du plan de caractérisation du PSSE (section 2.3).

Le tableau C-2 présente un exemple de modèle conceptuel applicable au site de dragage après les travaux. Ainsi, les sédiments qui ont été remis en suspension lors du dragage se dispersent et se déposent et le milieu où les sédiments ont été dragués constitue un nouveau milieu. La composante environnementale principalement touchée par les sédiments qui se dispersent demeure la colonne d’eau, mais l’écosystème maintenant ciblé est différent à cause de cette dispersion des matières en suspension, dispersion qui est dépendante des conditions hydrodynamiques. Donc, les récepteurs et entités écologiques ciblées changent aussi.

Les tableaux C-3 et C-4 présentent des exemples de modèles conceptuels pour l’activité de dépôt de sédiments en eau libre, alors que les tableaux C-5 et C-6 proposent des exemples de modèles conceptuels pour l’activité de recouvrement de sédiments contaminés. D’autres exemples, notamment pour le confinement en milieu riverain ou terrestre, sont également présentés à l’annexe C. Ces exemples ne sont pas exhaustifs et ne s’appliquent évidemment pas à tous les projets de dragage. Cependant, les aspects qui y sont couverts constituent une base adéquate pour l’élaboration de modèles conceptuels traitant d’activités similaires.

2.2.3 Formulation des hypothèses d’impacts vérifiables

Le modèle conceptuel doit conduire à la formulation d’hypothèses explicites qui permettront d’optimiser l’élaboration du plan de caractérisation et, plus précisément, le choix des paramètres d’évaluation. Ces hypothèses doivent décrire les impacts potentiels du projet de dragage et/ou de gestion des sédiments. De façon générale, l’énoncé des limites spatiales et temporelles, dans la formulation d’une hypothèse d’impacts vérifiable, permet de circonscrire ces limites dans le programme de surveillance ou dans le programme de suivi. L’élaboration de modèles conceptuels en termes d’activité et de limite dans le temps, soit pendant et après l’activité, permet de cibler trois types d’hypothèses d’impacts vérifiables :

  • celles qui nécessitent exclusivement une surveillance;
  • celles qui nécessitent exclusivement un suivi;
  • celles qui nécessitent une surveillance et un suivi.

Idéalement, la formulation d’une hypothèse d’impacts vérifiable doit intégrer, à partir du modèle conceptuel, les six éléments suivants :

  • les sources et/ou les agents stresseurs;
  • le mécanisme de transformation ou de transport;
  • les limites spatiales et les composantes environnementales (abiotiques) ciblées;
  • les limites temporelles;
  • les récepteurs;
  • les réponses négatives appréhendées.

Les hypothèses d’impacts peuvent découler directement de préoccupations déterminées identifiées lors de l’évaluation environnementale (ou de l’évaluation de la demande de permis ou de certificat d’autorisation). Cependant, selon le projet, les spécificités du site, la technologie utilisée et l’évolution des connaissances, plusieurs autres hypothèses d’impacts résultant du modèle conceptuel élaboré peuvent s’y ajouter. Des exemples de formulation d’hypothèses d’impacts vérifiables en lien avec les modèles conceptuels sont présentés à l’annexe C.

2.3 Élaboration du plan de caractérisation physique, chimique et biologique (activité 3)

Cette activité vise à déterminer les outils descriptifs qui serviront à vérifier les hypothèses précédemment formulées. Ainsi, on y précise les moyens techniques et scientifiques requis pour vérifier les hypothèses qui feront l’objet de la surveillance ou du suivi. Cette étape doit permettre de sélectionner des paramètres d’évaluation (section 2.3.1) et les paramètres de mesure (section 2.3.2) qui s’y rattachent. Elle doit également permettre de sélectionner des modes d’analyse et d’interprétation des données et de cibler des seuils d’actions (section 2.3.3), selon les résultats obtenus. Le tableau D-1 de l’annexe D illustre par des exemples les différents éléments constitutifs du plan de caractérisation.

L’élaboration du plan de caractérisation doit être basé sur l’acquisition de données fiables et en quantité suffisante afin de pouvoir prendre les bonnes décisions avec un taux d’erreur (faux positifs et faux négatifs) acceptable tout en limitant l’effort d’acquisition des données à un niveau minimal (toutes les données nécessaires mais que les données nécessaires). Ce processus est résumé dans les sections suivantes et est détaillé dans les documents suivants : USDE (1994), USACE (1994), USEPA (2006) et CEAEQ (1998).

2.3.1 Sélection des paramètres d’évaluation pour la surveillance et le suivi

Les paramètres d’évaluation constituent un ensemble de variables qui seront évaluées afin de tester les hypothèses d’impacts vérifiables. Ces paramètres doivent être définis clairement et de façon précise. Le suivi de plusieurs d’entre eux peut être requis pour valider une même hypothèse. La sélection d’un ou de plusieurs paramètres d’évaluation se fait en examinant l’ensemble des récepteurs précisés dans le modèle conceptuel et en répondant aux questions suivantes :

  • Est-ce que le paramètre d’évaluation est significatif par rapport à l’hypothèse à laquelle il se rapporte?
  • Est-ce que le paramètre d’évaluation est approprié au phénomène et à la problématique à l’étude?
  • Est-ce que le paramètre d’évaluation est mesurable ou estimable?

Il faut noter que les limites spatiales et temporelles établies dans le modèle conceptuel doivent également être prises en considération.

Puisque plusieurs paramètres d’évaluation peuvent être définis pour une même hypothèse d’impacts vérifiable, il peut être pertinent d’utiliser des approches d’évaluation intégrant un ensemble de paramètres de mesure. Dès la présente étape, ces approches généralement basées sur l’évaluation du poids de l’évidence doivent être considérées dans l’élaboration du plan de caractérisation afin de faciliter la sélection des paramètres d’évaluation et des paramètres de mesure qui leur sont associés (voir Menzie et coll., 1996; CEAEQ, 1998). Un exemple de lien entre l’hypothèse d’impacts vérifiable, un paramètre d’évaluation et un ensemble de paramètres de mesure pour un projet de dragage est fourni au tableau D-2 de l’annexe D. Dans cet exemple, on pose l’hypothèse que des sédiments seront remis en suspension dans la colonne d’eau lors des travaux de dragage, qu’ils atteindront un site de fraie situé en aval des travaux et affecteront de façon significative le potentiel de ce site. Pour rendre cette hypothèse vérifiable, on considère que les sédiments remis en suspension atteindront le site de fraie situé à 5 km des travaux et qu’ils affecteront de façon significative la reproduction de la perchaude (paramètre d’évaluation). Pour vérifier cette affirmation, la matière en suspension (MES) et la turbidité (paramètres de mesure physiques) seront mesurées au site des travaux ainsi qu’au site de fraie, où l’on vérifiera également le colmatage et l’effet des MES sur la survie des alevins (paramètre de mesure biologique).

2.3.2 Sélection des paramètres de mesure physiques, chimiques et biologiques

Les paramètres de mesure sont des descripteurs mesurables associés aux paramètres d’évaluation et qui doivent permettre de vérifier ces derniers (voir tableau D-3 de l’annexe D). Souvent, plusieurs paramètres de mesure sont requis pour un même paramètre d’évaluation. Il existe des :

  • paramètres de mesure physiques : description des propriétés physiques de l’agent stresseur (solide, liquide, gazeux, particulaire, grosseur, type de surface, etc.) et de l’écosystème (hydrodynamique, température, etc.);
  • paramètres de mesure chimiques : description des propriétés chimiques de l’agent stresseur en terme d’interaction et de concentration dans le milieu;
  • paramètres de mesure toxicologiques : description des perturbations liées à la réponse toxicologique retenue pour le paramètre d’évaluation;
  • paramètres de mesure biologiques : description des caractéristiques du récepteur en termes d’entités biologiques ou écologiques.

En règle générale, les paramètres de mesure sont liés à des outils de relation qui permettent de faire le lien entre les renseignements générés par les paramètres de mesure et le paramètre d’évaluation auquel ils sont associés. Citons, à titre indicatif :

  • extrapolation entre taxa : données de toxicité sur une espèce substitut extrapolées à une espèce présente dans l’écosystème ciblé;
  • extrapolation entre réponses : données de toxicité aiguë extrapolées à un effet de toxicité chronique;
  • extrapolation du laboratoire à l’écosystème ciblé : effet mesuré en laboratoire sur une espèce extrapolé à un effet dans l’écosystème ciblé pour la même espèce;
  • extrapolation d’un écosystème à l’écosystème ciblé : données observées dans des études connexes, extrapolées à l’écosystème à l’étude;
  • estimation des effets indirects : méthodes déductives comme un arbre d’événement ou un modèle de réseau trophique;
  • estimation du devenir de l’agent stresseur dans l’écosystème ciblé : estimation de la dispersion de l’agent stresseur dans le milieu;
  • estimation des concentrations dans les compartiments environnementaux : modélisation des concentrations dans les organismes aquatiques à partir de la concentration dans l’eau.

Les caractéristiques de l’outil de relation sont déterminantes dans le choix du paramètre de mesure qui y est associé. Il convient donc de choisir l’ensemble « paramètre de mesure/outil de relation » selon les besoins de vérification des paramètres d’évaluation, soit :

  • le niveau d’effort à fournir en fonction du niveau d’incertitude/précision acceptable;
  • la rapidité d’obtention des résultats;
  • la sensibilité de l’ensemble « paramètre de mesure/outil de relation ».

Les besoins reliés aux activités de surveillance peuvent être différents de ceux reliés aux activités de suivi. Les activités de surveillance nécessitent généralement une rapidité d’obtention des résultats et une sensibilité de l’ensemble « paramètre de mesure/outil de relation » afin de prévenir adéquatement les impacts sur le milieu en déclenchant en temps utile le plan de contingence (section 2.4). Les activités de suivi, pour leur part, sont généralement orientées davantage sur la précision de l’évaluation.

2.3.3 Détermination des seuils d’action

Pour intervenir efficacement lors des activités de surveillance et de suivi, des seuils d’action doivent être préalablement établis pour chacun des paramètres d’évaluation retenus. Ces seuils sont habituellement définis à partir de normes, de critères et de lignes directrices afférentes aux lois et aux règlements en matière de protection de l’environnement. Ils peuvent également être définis sur la base d’autres enjeux identifiés lors de l’évaluation environnementale ou de consultations publiques sur le projet. Le jugement professionnel des évaluateurs joue également un rôle important. Le tableau D-4 de l’annexe D présente un résumé des principaux outils légaux utilisés au Québec relativement aux projets de dragage et de gestion des sédiments. Ces outils peuvent s’avérer utiles pour la détermination des seuils d’action.

En l’absence de normes ou de critères fixés pour certains paramètres d’évaluation, l’état de référence de l’écosystème, évalué aux sites des travaux, ou l’état évalué à des stations de référence régionales, peut être utilisé pour établir des seuils d’action.

Afin de pouvoir porter un jugement sur la façon d’intégrer les seuils d’action associés à chacun des paramètres d’évaluation utilisés comme outils de gestion dans le cadre du PSSE, il est primordial de bien comprendre les fondements de leur établissement. Il est également important d’établir, pour chaque paramètre d’évaluation, un niveau de précision qui permettra de juger du dépassement ou non du seuil d’action. Des renseignements complémentaires à ce sujet peuvent être obtenus dans les documents suivants : USDE (1994), USACE (1994), USEPA (2006) et CEAEQ (1998).

2.3.4 Détermination du programme d’assurance et de contrôle de la qualité

Les programmes d’assurance et de contrôle de la qualité (PACQ) consistent en un ensemble de pratiques internes et externes, d’ordre administratif et technique, visant à assurer la qualité des données générées par le PSSE en termes de précision, exactitude, limite de détection, reproductibilité, etc. Les PACQ permettent aussi de s’assurer que l’utilisation de ces données corresponde à celle qui est prévue (CEAEQ, 1998; Martel et coll., 2002). Le processus de contrôle de la qualité vise à démontrer que les activités de cueillette et d’analyse des données répondent aux objectifs de qualité préalablement établis. Pour sa part, l’assurance de la qualité a pour but de vérifier l’efficacité du programme de contrôle de la qualité. Tout programme d’échantillonnage et d’analyse environnementale, notamment ceux axés sur la vérification d’hypothèses d’impacts d’un projet, doit comprendre un PACQ.

Les objectifs de qualité des données doivent être établis en suivant les principes directeurs suivants :

  • produire des données de bonne qualité au moyen de techniques d’échantillonnage normalisées et reconnues;
  • capter la variabilité spatiale et temporelle naturelle des indicateurs écologiques;
  • être sensible à la contamination des échantillons et à la présence de valeurs extrêmes dues aux conditions naturelles ou particulières des sources de perturbation;
  • fournir une documentation complète et assurer la fiabilité de toutes les données.

Pour que les données produites soient documentées adéquatement de manière à permettre une évaluation non équivoque des résultats, chaque PSSE doit définir un PACQ analytique correspondant à ses besoins. Un tel programme doit aborder les éléments suivants :

  • objectifs d’assurance de la qualité (précision, exactitude, limite de détection, comparabilité des données, etc.);
  • méthodes d’échantillonnage et de traitement des échantillons;
  • garde, transport, conservation et entreposage des échantillons;
  • méthodes d’étalonnage et fréquence d’étalonnage;
  • protocoles analytiques et approches expérimentales;
  • étalons de référence et de contrôle de la qualité;
  • documentation de référence;
  • validation, vérification et présentation des données;
  • vérifications internes du contrôle de la qualité;
  • méthodes et calendrier d’entretien préventif;
  • méthodes spécifiques à utiliser pour l’évaluation courante de la qualité des données;
  • mesures correctives;
  • rapports d’assurance de la qualité présentés à la direction;
  • références.

2.3.5 Sélection des méthodes d’interprétation des données

Généralement, plusieurs ensembles « paramètre de mesure/outil de relation » sont pris en considération pour un même paramètre d’évaluation. La sélection des méthodes de traitement des données représente une étape importante pour l’interprétation subséquente des résultats. Cette sélection est largement modulée par chacun des choix réalisés au cours des précédentes étapes de l’élaboration du plan de caractérisation.

Au moment de la sélection des modes d’interprétation des résultats, il est important de se rappeler que l’analyse a pour objet d’établir à quel point les prévisions sont justes ou confirmées par les données générées par le PSSE. Lorsque les données sont numériques, des méthodes statistiques de traitement des données sont généralement utilisées. D’autres approches d’intégration des données sont proposées dans la littérature. La sélection de la méthode d’interprétation des données doit tenir compte des limites de chacune des approches (Chapman, 1986; Menzie et coll., 1996; USEPA, 1992a, 1992b).

2.3.6 Élaboration du plan de caractérisation

L’aboutissement de l’ensemble des actions réalisées jusqu’à présent dans la Phase I du PSSE est l’élaboration du plan de caractérisation (sections 2.1 à 2.3). Ce plan concerne précisément les activités devant être réalisées pour acquérir les données nécessaires à l’atteinte des objectifs du PSSE. Il doit comporter au minimum les éléments suivants (décrits plus en détails à l’annexe E) :

  • sélection des stations d’échantillonnage;
  • détermination du nombre d’échantillons;
  • établissement de la fréquence de prélèvement;
  • choix des méthodes d’analyse sur le terrain et en laboratoire;
  • identification des procédures d’expédition et des modes de conservation des échantillons;
  • choix des équipements et des procédures d’échantillonnage;
  • mise en place du programme d’assurance et de contrôle de la qualité (PACQ);
  • mise en place du programme de santé et sécurité pour les travailleurs.

L’ampleur du plan de caractérisation est fonction de la nature et du volume de sédiments à draguer ou à gérer, de la durée des travaux, de la superficie affectée par les travaux, des technologies retenues pour la réalisation des travaux, de la sensibilité du milieu récepteur et du niveau de précision recherché en fonction des objectifs du PSSE. À cette étape du PSSE, il faut s’assurer de pouvoir établir la base de comparaison entre les effets réels des travaux et les effets anticipés. Pour ce faire, il faut obtenir les données qui permettront d’établir des points de référence témoignant des conditions d’origine du site, avant la réalisation du projet, ce qui permettra d’évaluer adéquatement les changements futurs.

2.4 Élaboration du plan de contingence (activité 4)

Tout PSSE doit comporter un plan de contingence. Celui-ci définit des options de gestion en prévoyant des actions à entreprendre selon les résultats obtenus lors de la surveillance et du suivi. Par exemple, si les résultats démontrent que le projet entraîne des effets au-delà des seuils d’action préalablement fixés, il est important que les promoteurs/gestionnaires disposent d’un plan de contingence qui définit les modalités d’intervention ainsi que la façon de les appliquer rapidement. De plus, si la surveillance et le suivi réalisés selon le plan de caractérisation ne permettent pas de vérifier adéquatement le dépassement ou non des seuils d’action, un ajustement doit être impérativement apporté.

Les deux éléments déclencheurs du plan de contingence sont les suivants :

  • le constat d’un dépassement du seuil d’action pour un paramètre d’évaluation;
  • l’incapacité d’affirmer ou d’infirmer, dans les limites des résultats obtenus et avec un niveau de confiance approprié, le dépassement des seuils d’action.

Le plan de contingence doit prévoir le déroulement des actions dès son déclenchement. Ces actions doivent être agencées logiquement à l’intérieur d’un schéma décisionnel qui précise, entre autres, les responsables de chacune des actions et le processus décisionnel. La portée du plan de contingence doit concorder avec celle du PSSE auquel il se rattache.

Deux catégories d’actions, non exclusives, peuvent être mises en branle lorsque le plan de contingence est déclenché :

  1. Modification du PSSE en cours de réalisation : deux cas peuvent conduire à la modification du PSSE initialement élaboré, soit le besoin de réduire les incertitudes dues à un paramètre d’évaluation ou de mesure, soit la détection d’impacts non prévus. Afin de mieux circonscrire l’incertitude entourant l’évaluation des impacts réels du projet, la modification du PSSE peut consister en :
    • l’ajout de paramètres d’évaluation;
    • l’ajout ou la modification des paramètres de mesure;
    • l’ajout ou la modification des stations d’échantillonnage;
    • l’ajout d’échantillons;
    • la modification des méthodes d’échantillonnage;
    • la modification des méthodes d’analyse des échantillons.
  2. Mise en place de nouvelles mesures d’atténuation : cette action permet de réduire les impacts réels du projet lorsque les seuils d’action prédéfinis sont dépassés. Les mesures d’atténuation ont été définies lors de l’évaluation environnementale du projet. Cependant, advenant le cas où certaines mesures d’atténuation mises en place avant ou pendant les travaux s’avéraient inefficaces ou que des impacts non prévus survenaient, il y aurait peut-être lieu d’appliquer des mesures d’atténuation supplémentaires. L’annexe F présente des exemples de mesures d’atténuation applicables à différentes sources pouvant avoir un impact sur la colonne d’eau ou sur le milieu terrestre.

    Lors de la planification des mesures d’atténuation, il est important de s’assurer qu’elles soient réalisables aux plans technique, logistique et économique et qu’elles puissent être mises en place rapidement. Des scénarios utilisant des mesures de rechange doivent être également prévus afin de pallier les imprévus. Des mesures d’atténuation peuvent être effectives à plusieurs niveaux :

    • Source : réduction de l’ampleur (durée, volume, nature) de l’activité.
    • Agent stresseur : mise en place de méthodes visant à réduire la présence de l’agent stresseur ou à l’éliminer, par exemple l’utilisation d’une technologie plus performante.
    • Écosystème : mise en place de méthodes visant à réduire la source lorsque certains mécanismes propres à l’écosystème risquent de décupler les effets de l’agent stresseur, par exemple une réduction des activités de dragage lorsque les conditions hydrodynamiques sont défavorables.
    • Récepteur : mise en place de systèmes permettant de réduire ou d’enrayer l’exposition de récepteurs à l’agent stresseur, plus particulièrement pour les récepteurs sensibles.
    • Réponse appréhendée : mise en place de méthodes permettant de limiter la réponse appréhendée de certains récepteurs à l’agent stresseur ou encore, la mise en place de mesures compensatoires, comme l’aménagement d’habitats fauniques afin de s’assurer qu’il n’y aura pas de perte nette d’habitat.

2.4.1 Plan d’urgence

Le plan de contingence d’un PSSE doit aussi comprendre un plan d’urgence. Celui-ci doit être conçu pour identifier les principales actions à entreprendre en cas d’incident ou d’accident durant le projet et pour préciser les mécanismes de transmission de l’alerte. La façon dont le plan d’urgence s’intègre avec ceux des municipalités concernées doit être aussi précisée. L’encadré A-7 de l’annexe A présente les éléments d’un plan type de mesures d’urgence proposé par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec (MDDEP, 2003a; 2003b; 2005; 2007). Les instructions contenues dans le plan d’urgence doivent faire partie intégrante du programme de sensibilisation et de formation des employés qui travaillent sur les différents sites des travaux (voir section 3.4).